Projets, expos
Communiqué de presse
« Penser à ne rien voir «»
LUC DETOT
Olatu,
100 avenue de l’Adour, Anglet 64600
Tel : 05.59.01.14.30
5 septembre 28 octobre 2022
Vernissage le jeudi 15 septembre de 18 à 21 h.
https://lucdetotactu.blogspot.com/
"l'homme
commence à penser les yeux en les perdant, et alors il implore"
Mémoires
d'aveugle, l'autoportrait et autres ruines.
Jacques
Derrida, 1990, catalogue R.M.N. Musée du Louvre.
Luc
Detot travaille sur le thème de la face, du visage, depuis plusieurs
années. Une séries de visages aux yeux obstinément clos, dessinés
au crayon sur de grands formats, résulte de cette investigation
menée avec une impressionnante pugnacité. A cette longue galerie de
têtes succèdent maintenant de plus petites peintures. Les mêmes
visages y apparaissent en partie sous diverses couches de glacis
coloré, parfois uniquement sous forme de fragments
Anne d’Andriesens
« Contrairement
au film de George Franju, Les
Yeux
sans
visage,
les portraits de Luc Detot offrent des visages sans yeux. Ils
parviennent cependant à s’inscrire dans notre mémoire, comme par
persistance rétinienne. Flasch, éclair, éblouissement…Ils nous
conduisent, par un simple clignement d’yeux, au-delà du miroir.
A
bras le corps, Luc Detot aborde la figure par la figure, en
choisissant des modèles dans son entourage pour en faire des
portraits. D’abord il photographie leur visage de face et en gros
plan, les yeux fermés, grimaçant comme les têtes de caractère
réalisées à la fin du XVIIIe siècle par le sculpteur
Messerschimt. Mais, ici, c’est le modèle qui se livre sur
commande à un exercice d’introspection. Il fait le vide en
lui-même, se met en apnée, tombe dans un petit coma volontaire. Le
corps immobile, le visage raidi, il rétracte énergiquement les
paupières pour se réfugier dans un monde intérieur, sans couleur,
ni lumière, au centre de soi-même. Le jeu de renvoi du
regardeur-regardé, tel qu’il se pratique traditionnellement dans
l’art du portrait, est ici interféré : les yeux clos ne sont plus
le miroir de l’âme.Cependant, l’absence de ce regard donne une
présence certaine au modèle. C’est comme s’il compensait ce
manque par une expressivité plus outrancière. D’un seul coup, les
rides deviennent
plus éloquentes et la crispation parvient même à traduire un vécu
plus intense, d’un caractère intime et presque familier qui est
partagé avec le spectateur. Comme irisés dans la phosphorescence de
la poudre de marbre, les portraits sensible à la lumière(ou
photo-sensisble)de Luc Detot ont cette fragilité et cette
résistance, cette fugacité et cette retenue propre aux œuvres qui
dialoguent avec le temps : des portraits du Fayoum aux
photos-palimpestes de Roman Opalka. L’artiste parle plus volontiers
de ces peintres fascinés par l’icône mais dont le travail ne se
réduit pas à une simple soumission face à une image
photographique. Parmi eux, Gerhard Richter et surtout, l’Américain
Chuck Close dont les portraits géants reproduisent délibérément
certaines déformations dues à la prise de vue. Choisissant, lui
aussi, ses modèles parmi ses amis, Close déclare «détacher
l’image du contexte selon lequel on a l’habitude de regarder le
portrait d’une personne». C’est à cette même exigence que nous
convie Luc Detot, en nous proposant de percevoir la réalité avec un
regard neuf, tout en réactivant un genre que l’on aurait pu croire
usé, celui du portrait.
Dominique
Dussol. Professeur en histoire de l’art contemporain à
l’université de Pau,
président du comité scientifique à la revue « Le Festin. »